Spéléologues et chauve souris
Spéléologues, nous rencontrons très souvent des chauves-souris (chiroptères) au cours de nos pérégrinations souterraines et sommes très sensibilisés à leur protection.
Très fragiles et menacées, les chauves-souris sont intégralement protégées par la loi. Il est donc interdit de les détruire, de les déranger intentionnellement, de les manipuler, de les capturer ou de les transporter. Malheureusement, la réglementation reste insuffisante pour la sauvegarde de ces espèces et il est essentiel de préserver leurs gîtes, leurs corridors de déplacement et leurs zones de chasse.
Une Directive « Habitat Faune-Flore », a été adoptée par la commission européenne, le 21 mai 1992, pour assurer la conservation de la diversité biologique en Europe.
Pour cela, la Directive prévoit la constitution d’un réseau de sites, le réseau Natura 2000.
À l’intérieur des sites de ce réseau, chaque état s’engage à assurer la préservation des milieux de vie des espèces animales et végétales dont la Directive a fixé la liste.
La Côte-d’Or est notamment concernée par un Document d’Objectifs (DocOb) « Cavités à chauves-souris en Bourgogne ».
Dans le cadre d’un plan régional d’action pour les chiroptères (PRAC), la SHNA (Société d’Histoire Naturelle d’Autun) coordonne un réseau de naturalistes et passionnés qui mènent un imposant travail d’inventaire et de suivi des populations de chiroptères
Depuis plusieurs années, le Comité Départemental de Spéléologie de Côte-d’Or s’est engagé aux côtés de la SHNA via une convention annuelle par laquelle des spéléologues bénévoles accompagnent techniquement les salariés et bénévoles de la SHNA pour des opérations de comptage hivernales dans les grottes et gouffres d’accès « difficile ».
On trouvera ci-après le compte-rendu par Marion Mongour d’une de nos récentes interventions.
Patrick Sologny
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Le lundi, c’est comptage de chauves-souris !
par Marion Mongour
Ça fait un moment que j’entends parler de ces comptages, organisés par la SHNA (Société d’histoire naturelle d’Autun), chargée du suivi et de la protection des populations de chauves-souris en Bourgogne, et notamment dans les zones Natura 2000. Le CDS21 en est partenaire, côté équipement des cavités et sécurité des sorties.
Aujourd’hui, deux premières pour moi : pour le comptage, et pour le Chaignay, que je découvre. En effet, la cavité a été fermée en 2021, après 20 ans de procédures, pour protéger les petits mammifères volants et notamment les minioptères de Schreiber, habitués du lieu. C’est une chance de pouvoir découvrir cette cavité, et de faire la visite en compagnie d’Alexandre et de Paul, de la SHNA, qui font tout pour que nous puissions sortir moins « bêtes » du trou.
On se retrouve sur le bord de la route vers 10h, nous nous habillons rapidement (il faut dire que la température hivernale motive à ne pas traîner). Après une bonne marche dans la neige, halte devant le panneau pédagogique, installé au fond de la combe, à l’aplomb de l’entrée de la grotte. Alex et Paul nous font un premier petit topo sur les différentes espèces que l’on risque de croiser, et sur leurs caractéristiques respectives.
On monte le flanc de la combe, en prenant garde à ne pas glisser – la neige cache les pierres roulantes. Bientôt, nous arrivons à l’entrée inférieure de la grotte : elle est défendue par de gros barreaux horizontaux. On constate que le gros bloc qui la surplombait est tombé juste devant … L’entrée supérieure est, elle, entièrement grillagée, avec porte et cadenas. Consignes avant d’entrer : on évite les cliquetis inutiles, on chuchote, on fait attention aux kits (nos sacs) qui traînent et aux lampes dans les yeux des bestioles, et on ne compte qu’à l’aller, pour éviter les doublons.
Olivier (Juaneda) commence à équiper le puits d’entrée. Il équipera la première vire, je devrai reprendre ensuite. Le comptage commence de suite : dans le puits, grand et petits rhinolophes sont suspendus, gare aux kits.
Arrivés au bas du puits, Paul me propose de l’accompagner dans la galerie basse, qui ramène vers l’entrée inférieure. On inspecte chaque recoin, chaque cloche, chaque fissure, à la recherche de petites boules de poils. Les rhinos sont très visibles, mais oreillards, murins et autres barbastelles sont un peu plus timides… Je me prends au jeu et déniche petits et grands murins, suis contente comme une petite fille à la chasse aux œufs de Pâques ! Paul m’explique comment les reconnaître, à leur ventre blanc.
Nous voyons aussi quelques murins de Daubenton, et des murins à moustache, qui se repèrent, si j’ai bien suivi, à leurs museaux plutôt noirs, quand ceux des petits et grands murins sont rosés. Paul essaie de me les faire reconnaître, c’est un peu dur, je vais tout oublier en moins de deux, c’est sûr, mais c’est chouette quand même. Avec leur ventre à l’air et leur pelage tout duveteux, ils sont pleins de petites gouttes de condensation, ça leur fait un petit habit de lumière.
On voit aussi deux minioptères, bien serrés l’un contre l’autre. Enfin, les oreillards qui dorment avec leurs grandes étiquettes soigneusement rangées sous leurs pattes… La galerie se termine, demi-tour, zut, les copains ont fini d’équiper pendant ce temps là – et ont même fini leur partie du comptage. J’y vais quand même, histoire de voir à quoi ça ressemble.
Je rejoins vite Olivier, allez, je déséquipe. Soso a posé une corde en fixe pour éviter la première vire, c’est la dernière fois qu’on a eu besoin de l’équiper, et puis c’est pas grave parce que je galère bien 1/à la passer 2/à la déséquiper. Heureusement, Olivier me file un coup de main, et ma super nouvelle clé à cliquet est d’une efficacité remarquable.
L’affaire est vite conclue, et nous voici ressortis du trou pour le déjeuner. Thé et petits gâteaux se partagent au cul des voitures, à l’abri du vent froid… Quelques jours plus tard, Alex nous enverra le bilan : 87 petites bêtes comptées, 12 espèces différentes, et un des plus importants effectifs comptés depuis 20 ans !